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Lectures et élucubrations de Liliba
20 mars 2012

Eux sur la photo - Hélène GESTERN

Eux sur la photo Hélène Gestern Lectures de Liliba0 coeur

Peut-on trouver la vérité à partir d’une photographie ? Déterrer le passé qu’on devine en regardant les visages de parents aujourd’hui disparus, et comprendre quelle a été leur vie ?

C’est ce qu’essaye de faire Hélène, sans savoir jusqu’où ses recherches la mèneront. Sa mère est décédée alors qu’elle n’avait que 3 ans et elle n’en n’a aucun souvenir, ou presque. Elle vient juste de retrouver dans les papiers de son père, tout récemment disparu, une photographie sur laquelle on aperçoit une jeune femme souriante, entourée de deux hommes qu’elle ne connait pas. Intriguée, elle prend contact par l’intermédiaire d’une petite annonce avec Stéphane, dont le nom de famille figurait au dos de la photo mystérieuse, pour lui demander si par hasard ces visages lui seraient familiers. Il y reconnait son père et c’est alors que débute entre eux une correspondance qui va les mener d’indices en interrogations, de concordances en découvertes.

Chacun de son coté va se plonger dans les archives familiales et tenter de percer le mystère de sa propre famille, car mystères il y a ! Hélène, dont le père s’est remarié, a été une enfant et une jeune fille aimée et heureuse, mais a vécu dans le non-dit. Et Stéphane a quant à lui presque toujours connu un père distant sans en comprendre la raison.

Voici une très jolie remontée dans le temps, où l’on découvre le passé enfoui des personnes disparues, et leurs secrets. La plume de l’auteur est toute en douceur, en finesse, et ces secrets de famille que l’on exhume nous tiennent autant à cœur qui si nous en connaissions personnellement les protagonistes. Notre mémoire joue bien souvent des tours, et il est parfois difficile de comprendre le passé avec juste quelques bribes de souvenirs, alors que les photographies, instantanés du quotidien et témoins muets des choses et des gens tels qu’ils ont vraiment été, dévoilent la vérité parfois tue ou cachée.

Une quête qui s’avèrera bien plus profonde que ce à quoi les deux correspondants s’attendaient et qui remettra même en cause leur propre vie, passé comme avenir. J’ai beaucoup aimé l’alternance de la correspondance entre Hélène et Stéphane, très actuelle, souvent factuelle puisque chacun narre à l’autre ses propres découvertes et ses interrogations d’avec les descriptions des photos qui nous plongent directement des années en arrière. Mais les photos peuvent aussi être trompeuses et ne montrer qu’une facette d’une personnalité, un instant T qui ne reflète en rien la vie dans son ensemble. Elles n’ont de valeur que si on en comprend le sens, les tenants et aboutissants et si on découvre réellement qui sont les gens dont le temps garde la trace sur le papier.

J’ai beaucoup aimé cette recherche commune, un peu moins le tour que prennent les choses entre les deux correspondants, dont j’ai eu peur à un moment qu’il ne devienne bluette sentimentale sans intérêt aucun (et qui m’a fait penser, du fait qu’une grande partie du roman soit épistolaire au roman de Daniel Glattauer, Quand souffle le vent du nord). Fort heureusement, le retour aux photos, à la vérité d’autrefois permet au lecteur de maintenir sa curiosité et au final c’est un roman très réussi, tout en délicatesse.

 

"La photographie a fixé pour toujours trois silhouettes en plein soleil, deux hommes et une femme. Ils sont tout de blanc vêtus et tiennent une raquette à la main. La jeune femme se trouve au milieu : l'homme qui est à sa droite, assez grand, est penché vers elle, comme s'il était sur le point de lui dire quelque chose. Le deuxième homme, à sa gauche, se tient un peu en retrait, une jambe fléchie, et prend appui sur sa raquette, dans une posture humoristique à la Charlie Chaplin. Tous trois ont l'air d'avoir environ trente ans, mais peut-être le plus grand est-il un peu plus âgé. Le paysage en arrière-plan, que masquent en partie les volumes d'une installation sportive, est à la fois alpin et sylvestre : un massif, encore blanc à son sommet, ferme la perspective, en imprimant à la scène une allure irréelle de carte postale. Tout, dans ce portrait de groupe, respire la légèreté et l'insouciance mondaine. Pourtant, la jeune femme ne s'est pas départie d'un soupçon de gravité, que ne démentent pas tout à fait son sourire et la lumière malicieuse de son regard. Elle est grande, elle aussi, moins que l'homme qui lui parle, mais suffisamment pour donner l'impression d'une harmonie dans leurs allures. Son corps est élancé, sa beauté un peu austère, avec son visage allongé et ses pommettes hautes et rondes. Le creux des joues est balayé par des cheveux épais, courts, coupés au carré. Et un chapeau blanc, posé de côté, finit de rappeler les élégantes des photographies des Séeberger.

Son voisin est mince, presque trop pour un homme. Sa chevelure est blonde (châtain clair ? le noir et blanc ne permet pas de trancher), ondulée, coupée court sur les côtés. La transparence liquide de son oeil permet de supposer des iris d'un bleu ou d'un gris très clair. Le reste du visage est doux, légèrement anguleux, avec des sourcils pâles, des traits délicats, une bouche aux lèvres minces. Le dernier des comparses, lui, est le plus petit des trois. Son corps nerveux et svelte est pris dans un polo clair ; il porte une moustache fine et un canotier, que n'aurait pas reniés un dandy fin de siècle. Si l'on en juge par son demi-sourire, joint à une pose volontairement affectée, il ne prend pas cette séance d'immortalisation très au sérieux ; le regard moqueur qu'il coule en biais vers la jeune femme au chapeau semble le confirmer."

 

Un livre voyageur de Jeneen, que je remercie de cette jolie découverte !

Le site de Hélène Gestern.

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Commentaires
L
@ Zazy, oui, et je m'en souviens encore bien aujourd'hui.
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Z
C'est un très bon livre je suis d'accord avec toi
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L
@ Fleur : oui, un peu rapide, je trouve aussi !
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*
J'ai aimé mais avec le bémol que tu soulignes et qui moi m'a gênée dans ce récit là: le rapprochement entre les deux personnages que je trouve beaucoup trop rapide...
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L
@ Manu, c'est juste sur les relations épistolaires entre les deux protagonistes : ils s'écrivent, se confient, ont envie de se connaître... à mon avis pas besoin d'idylle pour que le livre soit bien !
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