Les choses - Florence de la Guérivière
Quand les choses prennent vie
Parfois, elles semblent se liguer contre vous, elles s’amoncellent et se multiplient. Ou bien elles se cachent, et même disparaissent, juste pour vous énerver, et pile au moment où vous en avez besoin. Les choses, ces choses dont nous nous entourons, dont nous remplissons nos maisons, que nous utilisons sans y penser, achetées pour leur utilité ou leur esthétique, récupérées, aimées ou oubliées… Ces choses que nous croyons inertes seraient-elles donc vivantes ? On pourrait les croire en effet dotées d’une vie propre, se réjouissant de nous jouer un mauvais tour, se rendant indispensables, puis échappant à notre contrôle. Saviez-vous par exemple que les choses possèdent une hiérarchie propre, allant du menu peuple à l’élite ? Qu’elles peuvent se jalouser, mais aussi décider de s’allier contre vous ?
La guerre des choses n'aura pas lieu !
Et en effet, les choses font vivre un enfer à Florence de la Guérivière ! La guerre est déclarée et son issue est bien incertaine, car les choses sont malignes et fourbes, prêtes à pourrir la vie de l’auteur.
Ce court texte est un vrai régal que j’ai dégusté autant pour son thème très original que pour le style de l’auteur et son humour décalé. Une bien jolie découverte d’une auteur que j’avais déjà adoré lire avec le merveilleux roman La main de Rodin.
A noter que ce petit livre délicieux provient d'une toute nouvelle maison d'édition, Inédits, qui propose de jolies découvertes.
« Le four avait bien joué. Son gros ventre carré avait accumulé beaucoup, beaucoup de gaz en vingt minutes.
Il y eut une forte explosion. Suivie d’un hurlement.
Lorsque les autres accoururent, affolés, ils tombèrent sur une masse hirsute qui sentait le poulet grillé, projetée à terre sous la violence de la déflagration. Je ressemblais probablement à ces volailles plumées que l’on passe au chalumeau avant de les ligoter sous cellophane. Je n’avais pratiquement plus un cheveu sur la tête, en dehors d’une touffe dressée au sommet du crâne, sorte de crête à l’iroquoise, dont la présence moqueuse subsista plusieurs mois. Mon faciès, quant à lui, faisait figure de tournedos passé au grill, parfaitement saisi des deux côtés. À l’inverse, le rôti du déjeuner, rouge de satisfaction, ne portait pas la moindre trace de cuisson, et me considérait d’un air cru.
Bon, mais enfin, j’étais vivante. »