Séquestrée - Chevy STEVENS
Régulièrement, on parle dans les médias de personnes enlevées et assassinées dont, parfois, on retrouve ensuite les cadavres, mais rarement le coupable.
Moins souvent, la personne arrive à s'en sortir, à s'échapper et peut ensuite retourner à sa vie, son métier, retrouver famille et amis. Sauf que, comme vous vous en doutez, la séquestration laisse sur la personnalité des séquelles qu'il est bien difficile de faire disparaître et la peur ne s'évacue pas d'un seul coup avec la liberté retrouvée. Même, elle subsiste et prend des chemins plus sournois si bien que la personne continue en quelque sorte à se sentir enfermée, à l'intérieur d'elle-même cette fois-ci, prisonnière cette fois-ci des phobies nées en captivité.
C'est pour cela qu'Annie a besoin de l'aide d'un psy, pour raconter, évacuer enfin ces angoisses qui l'étreignent jour et nuit, ces tics qui deviennent presque des tocs, des sautes d'humeur, son mal-être. Elle a besoin de se retrouver, de reprendre ses marques, et même si elle sait qu'elle ne pourra jamais plus redevenir l'Annie d'avant, elle veut devenir au moins quelqu'un, plus que l'ombre d'elle-même...
Alors elle confie son calvaire à la psy qu'elle a choisie, elle narre dans le détail tout ce qu'il lui est arrivé pendant l'année complète où elle avait disparu, où elle était enfermée dans une cabane en bois perdue dans la montagne, avec un dingue qui attendait d'elle ce qu'elle était incapable de lui donner. Le fait de mettre les mots sur les moments vécus, sur la peur de ne jamais s'en sortir, de mourir, sur le fait d'avoir été obligée de se soumettre, et également aussi sur ce qui l'a fait tenir pendant ses longs mois arrivera-t-elle à l'aider à entamer une nouvelle vie ?
"Moi qui n'hésitais jamais avant de prendre une décision, je passe mon temps à tergiverser depuis que j'ai tué le Monstre. Je me souviens d'avoir lu un jour que les oiseaux en cage en partent pas tout de suite, même quand on leur ouvre la porte. Maintenant, je sais pourquoi."
Rien n'est moins sûr, mais pourtant, au fil des séances, la jeune femme tente de renouer avec ses proches, ses amis, sa mère avec laquelle les relations ne sont pas faciles, son ancien petit ami. Elle garde également contact avec le policier chargé de l'enquête qui continue toujours à traquer le coupable de cet enlèvement inexplicable.
Inexplicable ? Peut-être pas tant que ça... Annie va devoir à nouveau affronter des démons, et bien pire, s'il est possible, que "le monstre" comme elle le nomme, qui l'a maintenue en captivité... Le Mal est parfois caché tout près de nous et n'attend qu'une occasion pour ne faire qu'une bouchée de notre personne...
Impossible de vous en dire plus si je ne veux pas gâcher votre plaisir de lecture ! Sachez juste que j'ai totalement dévoré ce thriller, à toute vitesse tant je voulais enfin savoir le dénouement. Vous allez frissonner, être écoeurés, vous révolter et serez totalement, je l'espère, abasourdis par les dernières pages, au suspense haletant !
Un aspect très intéressant de la longue confession d'Annie à sa psy est aussi qu'elle exprime le fait d'avoir parfois ressenti d'autres sentiments que la peur vis à vis de l'homme qui l'a kidnapée. Pitié, haine, bien sûr, mais elle a vécu également certains moments où ils ont ri, souri et où il y avait comme une connivence entre eux. Syndrome de Stockholm ou pas, en tout cas, elle en éprouve une immense honte, comme si se laisser aller à éprouver quelque chose autre que de la répulsion pour cet être mauvais et timbré qui la gardait prisonnière était anormal et lâche de sa part.
"Cette nuit-là, j'ai eu pitié de lui. Sincèrement. C'était la première fois qu'il m'inspirait un autre sentiment que le dégoût, la peur ou la haine, et ça m'a fait flipper."
Seul petit bémol, j'ai trouvé les dialogues du début entre Annie et son kidnappeur un peu irréalistes, mais au final, on comprend que c'est sans doute le seul moyen que cette pauvre fille trouve pour ne pas devenir folle d'un seul coup...
Un grand merci aux Editions de l'archipel pour l'envoi de ce roman !
(amour fou et à sens unique, mais bon...)
Un roman lu également (et beaucoup apprécié) par Jacques Tessier.