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Lectures et élucubrations de Liliba
13 juin 2008

Mille Soleils Splendides - Khaled HOSSEINI

 

La lumière du soleil n'est pas la même pour tous...

 

 

mille_soleils

Nous sommes en Afghanistan en 1959. A la mort de sa mère, Mariam, jeune harami (bâtarde) de 15 ans, est forcée par son père d'épouser un homme de trente ans son aîné, afin de sauver l'honneur de la famille de ce père qu'elle vénérait, mais qui ne veut pas l'accueillir sous son toit avec ses femmes et ses enfants officiels.

Si les débuts du mariage se passent à peu près bien tant que Mariam obéit à son mari, qu'elle suit ses directives et exigences, qu'elle le sert, tant pour la nourriture que pour ses besoins sexuels, qu'elle porte la burqa pour sortir de chez elle (pour la protéger du regard concupiscent des autres hommes...), Rachid subit bientôt une transformation totale de son caractère (ou laisse plutôt ressurgir cette personnalité peu attrayante qu'il avait dissimulée) dès que Mariam fait une fausse couche et perd son premier bébé. Les espoirs de maternité envolés, Mariam va vivre pendant des années sous le joug de cet homme, sans amour, sans liberté, sans joie, comme un fantôme d'elle-même.

Dix-huit ans après son mariage, sa vie est bouleversée par l'arrivée dans la maison de la jeune Laila, sa petite voisine de quatorze ans. Laila a grandi dans la même ruelle, cadette d'une famille dont les ainés sont morts à la guerre, adorée et éduquée par son père professeur, cultivé et moderniste, et mal-aimée par sa mère, en pleine dépression depuis la disparition des deux garçons. Laila a grandi aux cotés de Tarik, un petit voisin, qu'elle a d'abord considéré comme un frère, mais qui s'est avéré au fil du temps être bien plus qu'un ami. Les deux jeunes gens s'avouent leur amour, sous les rafales de mitraillettes et les bombes qui commencent à pleuvoir sur Kaboul. Nous sommes en 1992, et devant la montée de la violence dans tout le pays, Tarik décide de partir à l'étranger avec ses parents. Laila ne peut l'accompagner sans abandonner les siens et se résoud donc à rester, mais elle va bientôt se retrouver orpheline, et sera recueillie par son voisin Rachid.

Commence alors une période ou la jalousie, la haine même grandissent dans le coeur de Mariam. Rachid a décidé d'épouser Laila, et celle-ci étant enceinte accepte, afin de procurer au bébé de Tarik confort et sécurité, car elle a appris d'un émissaire sa mort dans un hopital pakistanais. Laila met au monde une petite fille, Aziza et par sa douceur et sa discrétion va finir par trouver une alliée en Mariam. Laila donne ensuite à Rachid un fils, dont il fait un petit dieu, au grand dam de sa mère, qui n'a malheureusement rien à dire quand à son éducation...

Toutes deux sont victimes de la violence de Rachid, qui va grandissant dans la même mesure où ses affaires périclitent, et où la guerre détruit la ville, avec la fureur, la terreur et la folie meurtrière que les talibans amènent avec eux. Elles s'unissent pour tenter de fuir l'Afghanistan, et leur ville, Kaboul, qui dissimulait autrefois derrière ses murs "mille soleils splendides", mais n'est plus qu'un tas de gravas, décombres, où l'on meurt chaque jour, d'une balle, de faim ou de peur, et où la vie devient plus hasardeuse, dangereuse, terrifiante... Parviendront-elles à quitter le pays ? Et quel sera le prix de ce voyage vers un monde nouveau ?

 

J'ai beaucoup aimé ce livre, lu très rapidement, bien que je trouve que ce soit un peu trop romanesque à mon goût (ils s'aiment, ils se quittent, vont-ils se retrouver...). L'histoire est cependant intéressante et se dévore littéralement, on veut à tout prix savoir ce qui va arriver aux personnages et comment ils se sortiront de ces aventures. Mais ce qui m'a le plus passionné sont les relations hommes-femmes et la condition de la femme que dépeint avec beaucoup de précision, de retenue et, comment dire, en quelque sorte de respect, Khaled Hosseini, de même que toutes les explications qu'il donne sur la vie politique du pays, les pourquoi et comment de la guerre, les retournements d'amitiés, les trahisons, les prises de pouvoir...

Poignant tant l'histoire de ce pays est triste et lourde, alors que l'Afghanistan était autrefois un fleuron de la culture musulmane dans toute sa beauté, sa finesse, sa poésie....

Terrifiant tant l'espoir est mince que les conditions de vie des afghans s'arrangent un jour... Quand à celle des afghanes...

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A lire, donc, même si je dois tout de même préciser pour être honnête que j'avais préféré Les Cerfs Volants de Kaboul.

 

 

Le site de l'auteur, à visiter, ainsi qu'un article sur Passion du Livre

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Extraits : "Elle ignorait alors que harami signifiait bâtarde. De même, elle était encore trop petite pour éprouver l'injustice d'une telle injure et pour objecter que ce sont les parents d'une enfant illégitime qui sont à blâmer, et non l'enfant lui-même -lui dont le seul tort est d'être né. Pour autant, elle devina sans peine qu'une harami était quelque chose de répugnant, de laid. Un peu à l'image des cafards que sa mère jetait sans cesse hors de la kolba en pestant.

Ce n'est que plus tard, lorsqu'elle fut devenue grande, que Mariam comprit. La manière dont Nana lui crachait parfois cette insulte à la figure lui en faisait ressentir toute la cruauté, et elle finit par saisir qu'une harami était quelqu'un de non désiré, qui n'aurait jamais droit comme les autres à une famille, une maison, et à l'amour et à l'approhation des gens."

 

"Elle avait du mal à accepter qu'il lui parle sur ce ton, qu'il la traite avec mépris, qu'il la ridiculise, qu'il l'insulte, qu'il passe devant elle comme si elle n'était qu'un animal domestique. Mais, après quatre ans de mariage, elle savait ce qu'une femme était capable d'endurer sous l'emprise de la peur. Et le fait est qu'elle avait peut. Elle vivait dans la crainte continuelle des sautes d'humeur de Rachid et des moments où même les conversations les plus anodines devenaient pour lui prétexte à un affrontement, qu'il ponctuait à l'occasion de gifles ou de coups de poing et de pied. Parfois, il tentait de se faire pardonner à grand renfort d'excuses fallacieuses - parfois non."

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Et le passage le plus terrifiant, parce que VRAI :

 

"Notre watan s'appelle désormais l'Emirat islamique d'Afghanistan. Voici les lois que nous allons faire appliquer et auxquelles vous obéirez :

Tous les citoyens doivent prier cinq fois par jour. Quiconque sera surpris à faire autre chose au moment de la prière sera abattu.

Tous les hommes doivent se laisser pousser la barbe. La longueur correcte est d'au moins un poing en dessous du menton. Quiconque refusera de respecter cette règle sera batttu.

Tous les garçons doivent porter un turban - noir pour ceux scolairsés en primaire, et blanc pour ceux des classes supérieures - ainsi que des habits islamiques. Les cols de chemise seront boutonnés.

Il est interdit de chanter.

Il est interdit de danser.

Il est interdit de parler et de jouer aux cartes, aux échecs et aux cerfs-volants.

Il est interdit d'écrire des livres, de regarder des films et de peindre des tableaux.

Quiconque gardera des perruches chez soi sera battu et ses oiseaux tués.

Quiconque se rendra coupable de vol aura la main coupée. Et s'il recommence, il aura le pied coupé.

Il est interdit à tout non musulman de pratiquer son culte en un lieu où il pourrait être vu par des musulmans, au risque d'être battu et emprisonné. Quiconque sera surpris à essayer de convertir un musulman à sa religion sera exécuté.

A l'attention des femmes :

Vous ne quitterez plus votre maison. Il est inconvenant pour une femme de se promener dehors sans but précis. Pour sortir, vous devrez être accompagéne par un mahram, un homme de votre famille. Si vous être surprise seule dans la rue, vous serez battue et renvoyée chez vous.

En aucun cas vous ne dévoilerez votre visage. Vous porterez une burqa à l'extérieur de votre maison. Sinon, vous serez sévèrement battue.

Il vous  est interdit de vous maquiller.

Il vous est interdit d'arborer des bijoux.

Vous ne vous afficherez pas avec des vêtements aguichants.

Vous ne parlerez que lorsqu'on vous adressera la parole.

Vous ne regarderez aucun homme droit dans les yeux.

Vous ne rirez pas en public. Sinon, vous serez battue.

Vous ne vous vernirez pas les ongles. Sinon, vous serez amputée d'un doigt.

Il vous est interdit d'aller à l'école. Toutes les écoles pour filles seront fermées.

Il vous est interdit de travailler.

Si vous êtes reconnue coupable d'adultère vous serez lapidée.

Ecoutez bien et obéissez. Allah-u-akbar.

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Je crois que ça se passe de commentaires...

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Commentaires
F
Je n'avais effectivement pas vu ton article, je vais de ce pas le rajouter ! <br /> Bonne soirée Liliba !
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L
@ Maredetmoma : merci, je vais faire un tour chez toi !
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M
je met dans mes favoris
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M
J'adore Khaleid Hosseini, ta critique est très riche et intéressante! Et cet extrait est en effet d'autant plus terrifiant car il est réel!
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L
@ tous : ça m'a même donné l'envie de lire d'autres ouvrages sur ce pays, son histoire, son passé si riche, son évolution, la politique, la montée de l'intégrisme, les talibans... si l'un ou l'une de vous a un livre à me conseiller, je le mettrais volontiers en plus dans mes p'tites listes !!!
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